Commonplace Book
Les anglais au début des temps modernes, notaient les idées qu'ils jugeaient intéressante dans un carnet dédié qu'ils avaient toujours sur eux dénommé "commonplace book".
Dans son ouvrage Apologie du livre, l'historien et ancien directeur de la bibliothèque de l'université de Harvard Robert Darnton explique ainsi leur rôle : "Contrairement aux lecteurs modernes qui suivent un fil narratif de son commencement à sa fin, les Anglais du début des Temps modernes lisaient par bribes et passaient d'un livre à un autre."
Je lis comme un anglais du début des temps modernes
Ils fragmentaient les textes et réassemblaient ces derniers en les transcrivant à leur convenance dans différentes sections de leurs carnets de notes. Puis, ils relisaient les passages copiés et les réarrangeaient tout en ajoutant de nouveaux extraits.
La lecture et l'écriture étaient donc deux activités inséparables. Elles faisaient partie d'un effort continu visant à donner un sens aux choses, puisque le monde était riche de signes que l'on pouvait déchiffrer ; et rendant compte de ses lectures, on constituait son propre livre, marqué par la personnalité du lecteur.
Le mot commonplace, ou " lieu commun " en français, remonte à la Grèce antique ; il fait référence au lieu où un orateur conservait les arguments dont il comptait se servir lors de procès ou de réunions politiques. Un common place book peut également être traduit par " mémento " en français.
L'habitude de prendre des notes personnelles est également apparue dans d'autres pays, comme en Chine avec les biji (traduit approximativement par " carnet de notes "), qui pouvaient contenir des anecdotes, des citations, des réflexions, des critiques littéraires, des nouvelles fictives et tout ce qu'une personne jugeait utile de noter.
Au Japon, les zuihitsu (connus sous le nom de " livres d'oreillers ") étaient des collections de carnets destinés à documenter la vie d'une personne.